Le poème écoute aux portes
Le poème écoute aux portes, aux portes de Rennes, à Maurepas, aux portes de Bretagne, en Coglais, en ville, à la campagne. Partout où la parole des gens n’est pas entendue, trop éloignée des centres qui nous gouvernent. Yvon le men a tendu l’oreille, longtemps, hier dans le quartier dit difficile de Maurepas, a écouté les rumeurs de cette Babel où vivent ensemble tant bien que mal 54 nationalités différentes. A tendu l’oreille aujourd’hui dans l’autre périphérie, celle que les quatre voies traversent sans s’arrêter. Il a écouté mais aussi regardé le paysage où travaillent et que travaillent les paysans, les gens des abattoirs, où travaillaient les granitiers qui ont tant marqué le pays avec leurs mains dures comme la pierre. Les gens lui ont parlé en toute confiance de leurs vies rudes et riches, riches de vivre tant bien que mal ensemble, malgré leurs solitudes et leurs mystères. Comme pour les Rumeurs de Babel, le long poème Aux Marches de Bretagne avance tel un train à travers une histoire. Et d’un wagon l’autre, d’un vers l’autre, d’une vie l’autre on entend des voix qui, ensemble, font le récit ce pays où sont passés hier Chateaubriand, Hugo, Balzac, Paul Féval et aujourd’hui, le dessinateur Emmanuel Lepage qui, après avoir éclairé Les Rumeurs de Babel enchante, par son regard et avec ses images si sensibles, ces Marches de Bretagne où commence notre pays. Dans un premier livre, la ville ; dans le second, la campagne. Toujours le poème, le chant des hommes et des femmes qui ont tant de choses à nous dire avant qu’il ne soit trop tard.
Mais tu vas nulle part me dit cet homme
nulle part n’existe pas je luis dis
il ne voit que par le centre n’importe quel centre pourvu qu’il y soit
jamais par la périphérie où je vis où je vais