Les éditions Dialogues lancent une nouvelle collection « les mercuriales » consacrée à l’univers judiciaire.
Le Chancelier d’Aguesseau consacra sa vie à la justice. Durant 28 ans, il exerça la fonction de garde des sceaux, s’appliquant à veiller à l’exacte administration de la justice et à corriger ses imperfections. De 1698 à 1715, devant le Parlement de Paris, il prononça toujours un mercredi – d’où le choix du terme générique – dix-neuf harangues sur l’état de l’institution. Chef d’œuvre de l’art oratoire, chaque mercuriale décrivait dans une langue parfaite, où la vigueur et la netteté de la pensée n’avaient d’égales que l’ordre de la composition et le style des formules, les grandeurs et les servitudes de la carrière judiciaire.
Personne ne se retrouve devant un tribunal par plaisir. La victime s’y résout en espérant, l’accusé s’y présente en redoutant. Et tous en ressortent meurtris. Celui qui a perdu le procès n’est pas satisfait, suspectant son juge de tous les défauts, et celui qui l’a gagné ne l’est guère davantage, considérant que le tribunal aurait dû condamner plus sévèrement son adversaire.
Le voyage au pays des juges est donc une épreuve d’autant plus difficile que les moyens de l’institution ne correspondent pas aux besoins. Sans surprise alors la justice est perçue très négativement, sa lenteur, son injustice, son inefficacité étant lourdement dénoncées.
Pour ceux qui ont fait le choix d’y travailler, le chemin n’est pas moins ardu. Rendre la justice « au nom du peuple français » n’est pas faire justice. Défendre c’est combattre même armé de manière inégale. Servir l’institution revient à jongler avec les frustrations. Pourtant en dépit de cela l’intervention des juges ne cesse d’être réclamée.
Parallèlement, la place de la justice dans notre vie publique est disputée. Le pouvoir juridictionnel, impensable à la naissance de la Ve République, est devenu une réalité alors même que l’histoire de notre pays continue d’être marquée par la suspicion mutuelle entre le pouvoir politique et l’institution judiciaire.
Le pari de cette collection est de permettre l’expression de toutes ces voix et de souligner ainsi les efforts à accomplir pour que la scène judiciaire devienne le théâtre de l’apaisement des passions, indispensable à la sérénité de notre société. Pour que le débat s’ouvre et s’élève.
Comme les mercuriales de d’Aguesseau, les contributions seront courtes pour traiter de l’essentiel : un volume de 100 000 signes au maximum publié sous la forme d’un libelle de 50 à 60 pages vendu à petit prix.
Tous ceux qui, par vocation ou expérience, portent un regard documenté sur le fonctionnement de l’institution judiciaire. Des professionnels qui savent de quoi ils parlent. Des juristes qui s’attachent à remonter du détail à la perspective d’ensemble. Des citoyens qui se sont découverts justiciables. Tous ceux qui ne se contentent pas de dénoncer des failles ou des dérives mais qui s’attachent à reconstruire.
La collection Mercuriales est dirigée par Jean-Jacques Urvoas.